Ligués contre le cancer

Traitement

TUTHYREF, le réseau fait la force

Réfractaires au traitement par l’iode radioactif, certains cancers de la thyroïde sont des pathologies trop rares pour être traitées efficacement au seul échelon local. C’est pourquoi des centres spécialistes de ce type de cancer ont rejoint le réseau TUTHYREF pour partager leurs compétences.

Essais cliniques
Réseau
Thyroïde

21/09/2021

Lorsque l’on est atteint d’une pathologie rare, il est plutôt rassurant d’être pris en charge par l’ensemble des meilleurs spécialistes français de cette pathologie. Et c’est justement ce qu’offre le réseau TUTHYREF (TUmeurs THYroïdiennes RÉFractaires) aux quelque 350 à 400 patients atteints chaque année d’un cancer de la thyroïde réfractaire au traitement classique par l’iode radioactif (lire encadré ci-dessous). Créé en 2009 par le professeur Martin Schlumberger, le réseau TUTHYREF regroupe aujourd’hui 4 centres répartis sur le territoire national, y compris en Guadeloupe, à La Réunion et en Polynésie. Labellisé par l’Institut national du cancer (INCa), il fait partie du réseau ENDOCAN, qui regroupe les réseaux de prise en charge des cancers endocriniens, comme le réseau COMETE (tumeurs surrénales) et le réseau RENATEN (tumeurs neuroendocrines). Il a trois objectifs : le soin, l’enseignement et la recherche.

Une politique de soins homogène et optimale

Pour remplir les deux premiers, des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) sont mises en place à l’échelon local, et deux RCP nationales ont lieu chaque mois sous forme de webconférence. Des moments d’échange entre spécialistes de différentes disciplines (endocrinologie, médecine nucléaire, radiothérapie, chirurgie…) autour des dossiers les plus complexes des patients pris en charge par chaque centre. Un système assurant une politique de soins homogène et optimale quelque soit le lieu de résidence du patient, et permettant aux différents praticiens de bénéficier de l’expérience de leurs confrères. Enfin, une journée annuelle du réseau a lieu en janvier, au cours de laquelle sont discutés et mis en place les prochains projets de recherche.

Essais randomisés et base de données nationale

Pour ces projets, le réseau TUTHYREF bénéficie de deux outils. Le premier est la mise en place d’essais cliniques randomisés pour améliorer les pratiques thérapeutiques. Dernièrement, deux essais baptisés Estimabl 1 et 2 ont porté sur l’étude d’une désescalade thérapeutique, consistant à diminuer les doses d’iode radioactif administrées aux patients. Cela a permis d’établir qu’un traitement par iode radioactif n’était pas nécessaire pour les patients opérés pour un cancer de la thyroïde à bas risque de récidive – les patients étant classés en trois catégories : bas risque, risque intermédiaire, risque élevé. L’essai Intermediate-01, piloté par le docteur Bardet de Caen, s’intéresse actuellement à la personnalisation du traitement chez les patients à risque intermédiaire de récidive. Plusieurs autres essais dans différentes indications sont en cours, pilotés par différents membres du réseau TUTHYREF. Les prochains projets de recherche concerneront les patients à risque élevé de rechute, les cancers anaplasiques, ou encore les moyens de rendre sensible à l’iode un cancer réfractaire. Enfin, le second outil est une base de données nationale qui répertorie les cas enregistrés par chaque centre et alimente ainsi des études rétrospectives sur les plus larges cohortes disponibles. Une base de données que le réseau TUTHYREF aimerait bien connecter à d’autres bases européennes…

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Le point de vue du médecin

Dr Julien Hadoux, oncologue médical à l’Institut Gustave Roussy, et co-coordonnateur du réseau TUTHYREF

« Le réseau TUTHYREF est un dispositif collaboratif très efficace, notamment grâce à la RCP nationale, qui permet de maintenir et développer un très haut niveau de compétence, et d’offrir aux patients une qualité de soins homogène sur l’ensemble du territoire. L’autre grand motif de satisfaction est la mise en place d’essais cliniques collaboratifs nationaux et d’une base de données, nationale elle aussi, qui permettent d’améliorer les connaissances de la pathologie et l’efficacité des traitements. Et il règne une excellente ambiance entre les membres du réseau, ce qui ne gâche rien ! »

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Une pathologie assez rare, mais de bon pronostic. Relativement rare, avec en moyenne 10 000 cas par an, le cancer de la thyroïde se rencontre davantage chez les femmes que chez les hommes. Le principal facteur de risque identifié est une irradiation durant l’enfance. La pathologie est diagnostiquée par échographie et cytoponction avec cytologie, puis est traitée par la chirurgie et éventuellement l’administration d’iode radioactif en fonction du risque de rechute. Le pronostic est généralement bon : seuls moins de 5 % des cancers de la thyroïde se révèlent réfractaires à l’iode, et nécessitent alors des traitements spécifiques. Trois types de cancer sont concernés par la prise en charge dans le réseau TUTHYREF : les cancers différenciés et médullaires localement avancés ou métastatiques, et les cancers anaplasiques.