Ligués contre le cancer

Covid-19

Les questions éthiques posées par la crise

La pandémie de Covid-19 a soulevé des questions éthiques sinon inédites, du moins qui ne s’étaient jamais posées jusqu’alors avec une telle ampleur et une telle urgence. Sur cet aspect aussi, rien ne sera plus jamais comme avant…

Accès aux soins
Ethique
Pandémie

14/03/2022

« La crise a exacerbé des questions éthiques déjà présentes. Mais elle a aussi posé des questions nouvelles ou sous un nouveau jour. Par exemple, qu’est-ce qu’un système de soins équitable ? »

Jean-Philippe Cobbaut, professeur d’éthique médicale et directeur du Centre d’éthique médicale de l’Université catholique de Lille.

« La pandémie a aussi porté l’attention sur les soignants et les patients. Certaines évolutions se sont accélérées, comme le rôle du numérique dans le système de soins : songez à l’explosion de la télémédecine ou à une application comme TousAntiCovid. Mais la crise a également eu pour effet de laisser largement de côté  la démocratie sanitaire, avec les risques que cela comporte. On a aussi pris une conscience plus aiguë de tout l’enjeu de l’accès aux soins. Mais c’est une difficulté systémique, qui ne résulte pas seulement de la crise sanitaire. Quant à la question du tri des malades, elle est d’autant plus délicate qu’on est dans un système qui entend assurer une couverture universelle des soins. Même s’il y a eu des situations très difficiles qui ont pu obliger à faire des choix, le but a toujours été de permettre au plus grand nombre d’accéder aux soins.

De même, on a beaucoup parlé de contraintes, notamment à propos de la vaccination. Or, depuis la déclaration de l’OMS dite “d’Alma-Ata”, en 1978, on va plutôt dans le sens inverse, celui d’une décision partagée, reposant avant tout sur  la motivation et l’accompagnement. Sur l’évolution de nos conceptions de la santé, il est clair que la pandémie, combinée avec l’impact du changement climatique, va conduire à réfléchir de façon différente et plus fine à ce que représente la santé, à ses enjeux, à ses moyens… Et un certain nombre d’évolutions à l’œuvre ou en gestation – la génétique, le numérique, la médecine prédictive… – vont sans aucun doute accélérer cette réflexion. »

..

Pantere : l’éthique en temps de crise
Recommandée, dès mars 2020, par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), la mise en place de « cellules de soutien éthique » a donné lieu à une étude intitulée Pantere (PANdémie, TERritoires et Éthique). Celle-ci a été menée notamment avec l’Inserm, le CHU de Caen-Normandie et le Centre de lutte contre le cancer François Baclesse de Caen, en partenariat avec Sciences Po et plusieurs espaces de réflexion éthique régionaux (ERER). Les travaux ont porté notamment sur les interactions et les modes de gouvernance de l’éthique en situation de crise, mais aussi sur les saisines des cellules de soutien éthique mises en place au début de la crise sanitaire. Plusieurs thèmes ont émergé, comme les droits et les besoins des usagers, le grand âge et le maintien des liens sociaux, la fin de vie, la mort et le processus de deuil, le dépistage, la vaccination et les outils de veille… Chacun de ces questionnements fait l’objet de propositions concrètes, mais aussi de préconisations plus générales. Le rapport de synthèse recommande ainsi, entre autres, de promouvoir des groupes d’éthique territoriale thématiques (santé publique, grand âge, fin de vie…) pour les professionnels et les usagers. Il préconise aussi de « faire vivre l’éthique au sein de la démocratie sanitaire », par exemple en renforçant la collaboration avec les associations d’usagers, de patients et de citoyens, en incluant leurs représentants au sein des ERER. Le Gouvernement devrait prochainement présenter une « feuille de route pour le développement de l’éthique » reprenant des propositions du rapport.

En savoir plus

Le rapport de synthèse de l’étude Pantere : https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/erer_ rapport_pantere_2021.pdf