Ligués contre le cancer

Retour à l'emploi

Comment reprendre le travail après un cancer quand on est salarié ?

Afin que le retour au travail ne se transforme pas en parcours du combattant, il est important d’être accompagné et informé. Le point avec le docteur Frédérique Faucher, médecin au sein de l’ACMS, le premier service de santé au travail de France.

Accompagnement des salariés
Médecin du travail
Reprise d'activité professionnelle

18/12/2023

Quelles sont les difficultés rencontrées lors de la reprise d’une activité professionnelle après un cancer ?

Frédérique Faucher : Après avoir vécu au rythme des soins, les personnes malades qui exerçaient une activité professionnelle voient bien souvent le retour au travail comme une façon de reprendre leur vie en main. Seulement, quand on a traversé l’épreuve du cancer, on n’est plus tout à fait la même personne. On peut ressentir des douleurs, de la fatigue, se sentir fragilisé. Si l’on éprouvait déjà des difficultés dans son travail, il est également possible de se retrouver dans un état de prise de conscience qui peut être douloureux. Des questionnements peuvent apparaître : est-ce que j’ai encore envie d’exercer ce travail ? Dans quelles conditions ?

Nous sommes là pour écouter et accompagner les salariés dans leur projet en faisant le lien avec l’employeur, si le salarié le souhaite.

Quel est le rôle du médecin du travail concernant la reprise d’un salarié après un traitement ?

F. F. : Sa mission première est de s’assurer que l’état de santé d’une personne est compatible avec son travail et que celui-ci ne nuit pas à sa santé. Après un long arrêt maladie, la médecine du travail met en œuvre toutes les solutions pour que la personne puisse reprendre dans les meilleures conditions possible. Pour cela, nous partons de la situation personnelle de chacun, de ses envies, de ses besoins et de ses capacités. Nous sommes là pour écouter et accompagner les salariés dans leur projet en faisant le lien avec l’employeur, si le salarié le souhaite.

Concrètement, quelles peuvent être les solutions proposées ?

F. F. : Nous pouvons conseiller la mise en place d’un temps partiel thérapeutique, un aménagement des horaires, un reclassement… Une femme qui aurait été traitée pour un cancer du sein, par exemple, peut souffrir d’un lymphœdème du bras. Cela ne l’empêche pas forcément de travailler, mais elle peut éprouver des difficultés à taper à l’ordinateur. Le médecin du travail peut alors missionner un ergonome pour étudier les solutions possibles afin d’aménager au mieux son poste de travail. Dans d’autres situations, quand une personne envisage, par exemple, une reconversion professionnelle – par choix ou par nécessité –, nous pouvons également l’orienter vers nos assistantes sociales.

Dans le cas d’un employeur qui ne respecterait pas les préconisations de la médecine du travail pour aménager le poste d’un salarié… qui a le dernier mot ?

F. F. : La médecine du travail ne fait pas autorité ; elle a un rôle de conseil. De même, dans la relation employé-employeur, nous n’avons pas vocation à assurer la médiation, mais plutôt à jouer les facilitateurs. Quand un employeur se montre peu compréhensif, je peux être amenée à le contacter pour lui expliquer les besoins de son employé – et ce, uniquement à la demande du salarié lui-même – et cela suffit souvent à améliorer les choses. Par ailleurs, il faut garder à l’esprit que l’on ne peut pas tout demander à un employeur. Conseiller un bureau individuel pour un salarié alors que son lieu de travail n’offre que des open spaces serait compliqué, voire impossible à assumer pour l’employeur. Il faut rester vigilant dans les aménagements de poste recommandés afin que les exigences du salarié ne jouent pas en sa défaveur.

Comment préparer au mieux sa reprise ?

F. F. : Si elle n’est pas obligatoire, la visite de préreprise est vivement conseillée. Elle est l’occasion d’expliciter toutes les questions que soulève le retour au travail et de préparer des réponses adaptées. Anticiper au maximum la reprise, en parler et se faire accompagner sur ses besoins spécifiques sont les clés pour un retour professionnel dans les meilleures conditions possible.

Suivez-vous le salarié au-delà de sa reprise ?

F. F. : Le salarié sait qu’il peut me contacter à tout moment, y compris après la reprise et ce, sans que son employeur en soit informé. S’il a repris à plein temps et qu’il ne s’en sent finalement pas capable après quelques jours, nous pouvons mettre ensemble au point une autre organisation plus compatible avec son état. Rien n’est figé et le médecin du travail reste disponible pour accompagner au mieux le salarié tout au long de sa carrière.